6 juillet 2023

Avis de la Cour de cassation sur le titre exécutoire émis par l’ONIAM et la place de la demande reconventionnelle de l’Office dans l’instance

► Dans un avis du 28 juin 2023, la Cour de cassation s’est prononcée sur plusieurs questions relatives l’émission d’un titre exécutoire par l’ONIAM et à la place de la demande reconventionnelle effectuée par l’Office au cours de l’instance l’opposant à l’assureur.

Dans le cadre d’une instance opposant l’ONIAM à un assureur, le tribunal judiciaire de Bobigny a sollicité la demande d’avis suivante :

« Questions n° 1

a) L'ONIAM est-il en droit d'émettre un titre exécutoire afférent au recouvrement d'une créance née de l'application de l'article L. 1221-14 du Code de la santé publique Numéro Lexbase : L1608LZL ?

b) L'ONIAM peut-il, dans le cadre d'un litige afférent à une contamination par le VHC (en application de l'article L. 1221-14 du Code de la santé publique ou du IV de l'article 67 de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 Numéro Lexbase : L2678IC8), formuler une demande reconventionnelle ou subsidiaire de condamnation de l'assureur à la somme correspondant à la créance du titre exécutoire et aux intérêts y afférent, dans l'hypothèse de la validation du titre ? Dans l'hypothèse de l'annulation du titre au motif d'une irrégularité formelle ?

c) L'avis en date du 5 avril 2019 (CE 9e-10e ch. réunies, 5 avril 2019, n° 413712, publié au recueil Lebon Numéro Lexbase : A2927Y8W) du Conseil d'État relatif à l'ordre de l'examen du titre exécutoire, à savoir le bien-fondé de la créance puis la régularité formelle du titre, s'impose-t-[il] au juge judiciaire dans le contentieux opposant les assureurs à l'ONIAM sur le fondement de la nature privée du contrat d'assurance ?

Question n° 2 

Le moyen visant à la contestation du droit de l'ONIAM à formuler une demande reconventionnelle qualifie-t-[il] une fin de non-recevoir dont le juge de la mise en état a compétence pour la trancher ou un moyen de défense au fond relevant de la compétence du tribunal judiciaire, ce qui implique la potentielle application du deuxième alinéa de l'article 789 du Code de procédure civile Numéro Lexbase : L9322LTG ? »

L’avis. Les réponses apportées par la Cour de cassation sont les suivantes.

• Sur le droit de l’ONIAM d’émettre un titre exécutoire sur le fondement de l’article L. 1221-14 du Code de la santé publique :

le droit pour l’ONIAM d’émettre un titre exécutoire a été reconnu par le Conseil d’État sur le fondement de l’article L. 1221-14 et L. 1142-15 Numéro Lexbase : L5390IR3 du Code de la santé publique (CE, Avis, 9 mai 2019, n° 426365 Numéro Lexbase : L2762LQD et 426321 Numéro Lexbase : L2763LQE) et par la Cour de cassation sur le fondement de l’article L. 1142-15 précitée (Cass. civ. 2, 14 avril 2022, n° 21-16.435, FS-B Numéro Lexbase : A44677TM). Il s’en déduit, que, pour recouvrer les sommes versées aux victimes de dommages, l'ONIAM peut soit émettre un titre exécutoire à l'encontre des assureurs des structures reprises par l'EFS ou encore des assureurs des personnes considérées comme responsables de dommages, de celles-ci ou du fonds, auxquels il s'est substitué, soit saisir la juridiction compétente d'une demande à cette fin.

• Sur la possibilité pour l’ONIAM de former des demandes reconventionnelles lorsque l’assureur conteste devant le juge judiciaire la validité du titre exécutoire :

Lorsque le titre est validé par le juge, l'ONIAM n'est pas recevable à former une demande reconventionnelle pour obtenir la condamnation du débiteur à lui payer le montant de ce titre ; mais il peut demander reconventionnellement sa condamnation à lui payer des intérêts moratoires sur cette créance et, le cas échéant, la pénalité prévue aux articles L. 1142-15, L. 1142-24-7 Numéro Lexbase : L9041IQW ou L. 1142-24-17 Numéro Lexbase : L7367LZU du Code de la santé publique.

Il peut, en outre, former, à titre subsidiaire, dans l'éventualité où le juge annulerait le titre exécutoire pour un motif d'irrégularité formelle invoqué par le débiteur, une demande reconventionnelle de condamnation de celui-ci au montant du titre exécutoire, ainsi que des intérêts moratoires et, le cas échéant, de la pénalité prévue aux L. 1142-15, 1142-24-7 ou L. 1142-24-17 du Code de la santé publique.

Dès lors que la juridiction est appelée à statuer sur des responsabilités liées à la survenue de dommages corporels et sur les préjudices en résultant, l'ONIAM doit mettre en cause les tiers payeurs, conformément aux dispositions de l'article L. 376-1 du Code de la Sécurité sociale Numéro Lexbase : L8870LHY, afin que ceux-ci puissent solliciter le remboursement de leurs débours.

• Sur l’ordre d’examen des demandes formées par l’assureur :

en application des articles 4 Numéro Lexbase : L1113H4Y et 5 Numéro Lexbase : L1114H4Z du Code de procédure civile, il incombe au juge judiciaire d'examiner, d'abord, la demande principale formée par le débiteur en annulation du titre exécutoire émis par l'ONIAM pour un motif d'irrégularité formelle, puis, le cas échéant, sa demande subsidiaire en annulation du titre exécutoire pour un motif mettant en cause le bien-fondé du titre et les demandes reconventionnelles formées par l'ONIAM.

• Sur la qualification du moyen visant à la contestation du droit de l’ONIAM à formuler une demande reconventionnelle :

le moyen contestant la recevabilité d'une demande reconventionnelle formée par l'ONIAM constitue une fin de non-recevoir susceptible d'être tranchée par le juge de la mise en état en application de l'article 789 du Code de procédure civile.



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